La révision du revenu cadastral

revenu cadastral | Cabinet d'avocats HAVET
Le revenu cadastral est une lourde charge pour les propriétaires

La Région bruxelloise chasse les propriétaires des habitations classées 0 et 1, c’est-à-dire des habitations qui sont reprises sur les relevés du cadastre comme étant dépourvues de chauffage et de sanitaires ou étant équipées seulement de l’une de ces deux commodités (classé 1). Il est rare que les habitations soient encore aujourd’hui dépourvues de ces installations indispensables à la vie moderne et il semble normal que la région entende obtenir la révision du revenu cadastral de ces habitations, mais il nous a quand même semblé utile de revenir sur cette notion et sur les conséquences fiscales qui en découlent.

Définition

Le revenu cadastral est une évaluation fiscale de la valeur locative annuelle moyenne d’un immeuble situé en Belgique. Ce revenu intervient principalement pour l’établissement de deux impôts distincts : le précompte immobilier d’une part, à l’impôt des personnes physiques et d’autre part puisque les propriétaires doivent déclarer le revenu cadastral de leur(s) immeuble(s) dans certains cas bien précis.

Mode d’établissement du revenu cadastral 

L’administration du cadastre fixe en principe le revenu cadastral pour une période de dix ans. Il est de notoriété publique que cette règle est une belle chimère puisque la dernière et le seul réajustement (ou péréquation) date de 1975.

Etant donné que la péréquation générale décennale est perpétuellement reportée parce que qu’elle demande un travail considérable à l’administration fiscale et doit intervenir à l’initiative d’une décision politique que personne ne veut assumer sous peine de créer une révolution en Belgique, les revenus cadastraux sont indexés chaque année depuis l’exercice d’imposition 1992 (1,7491 en 2017).

De ce curieux système découlent de curieuses conséquences et de profondes inégalités. L’administration doit évaluer les nouveaux immeubles construits à leur valeur de 1975 par un savant calcul d’actualisation.

Mais il existe aussi des inégalités de fait entre, d’une part, les immeubles anciens qui ont été évalués sur la base de critères et de niveaux d’équipements qui datent de plus de 40 ans alors qu’ils ont été profondément rénovés dans la majorité des cas et d’autre part, les immeubles actuels bien plus modernes dont le niveau d’équipement est difficile à cacher à l’administration.

Les immeubles modernes ont donc bien souvent un revenu cadastral nettement plus élevé que les anciens immeubles.

L’évaluation se fait sur la base du marché locatif sur lequel le bien est situé, de la superficie, du niveau de confort (chauffage, salles de bains, etc.) et en tenant compte de points de comparaisons avec d’autres biens.

Modification du revenu cadastral

L’administration fiscale peut réévaluer la valeur cadastrale d’un immeuble. Elle le fait à l’occasion des péréquations périodiques, mais nous avons déjà vu que ces réajustements n’ont jamais eu lieu.

Elle le fait aussi à l’initiative du contribuable qui est tenu par la loi de déclarer spontanément toute modification apportée à un immeuble bâti ou non en vertu de l’article 473 du Code des impôts sur les revenus.

Il est bien entendu relativement rare que le contribuable déclare spontanément ces modifications, sauf dans l’hypothèse où un permis de bâtir est indispensable puisque dans ce cas de figure, l’administration sera automatiquement informée des travaux et ne manquera pas de réagir.

L’actualité nous apprend également que l’administration peut enquêter pour vérifier si le revenu cadastral qui est défini établi correspond toujours à la réalité. Pour ce faire elle peut demander des renseignements au contribuable lui-même, aux autres administrations publiques et même pénétrer dans les lieux pour vérifier que les informations déclarées sont exactes.

Le revenu cadastral nouvellement établi est notifié par lettre recommandée à la poste à l’adresse du propriétaire qui dispose d’un délai de deux mois pour introduire une réclamation s’il estime que le revenu cadastral est trop élevé. A défaut d’obtenir satisfaction au terme de cette procédure administrative, le propriétaire dispose du droit de lancer une procédure d’arbitrage et ensuite une procédure judiciaire.

Utilité du revenu cadastral 

Le revenu cadastral a deux principales fonctions pour les particuliers : il intervient dans le calcul du précompte immobilier et dans le calcul de l’impôt des personnes physiques.

Le précompte immobilier

Il s’agit d’un impôt qui avait avoir jadis un caractère d’avance à l’impôt sur les revenus. Il a évolué depuis en un impôt totalement distinct, sauf pour les sociétés qui peuvent encore le déduire.

Cet impôt est calculé en fonction d’un pourcentage du revenu cadastral indexé (1,25% en Wallonie et à Bruxelles, 2,50% en Flandre) sur lequel les provinces, les agglomérations et les communes viennent appliquer des centimes additionnels. Cet impôt est donc désormais entièrement régionalisé et l’on peut donc comprendre que la région bruxelloise cherche à optimiser ses recettes fiscales en réévaluant les anciennes habitations.

L’impôt des personnes physiques

La propriété d’un immeuble constitue une source de revenus potentiels qui intéresse le fisc. C’est la raison pour laquelle il est en principe obligatoire de déclarer le revenu cadastral de l’immeuble dont vous êtes propriétaire.

Cependant, la loi prévoit à l’article 12 §3 du Code des impôts sur les revenus que lorsque vous occupez le bien immobilier dont vous êtes propriétaire, vous n’êtes pas obligé d’en déclarer le revenu cadastral. Lorsque vous occupez plus d’une habitation, l’exonération est accordée pour une seule habitation à votre choix.

Lorsqu’un immeuble est donné en location, c’est encore le revenu cadastral qui doit être déclaré, sauf si le bien est loué à une personne qui l’affecte à son activité, auquel cas c’est le revenu locatif réel qui vient s’ajouter aux revenus du propriétaire.

Sachant que le revenu cadastral est bien souvent inférieur au revenu locatif réel, la location d’un immeuble à un particulier constitue donc bien souvent un bel avantage par rapport à la déclaration du revenu réel.

Dans ce cas, le revenu cadastral est alors ajouté aux revenus professionnels et taxé au taux ordinaire de l’impôt des personnes physiques.

Conclusion

Le revenu cadastral est une très vielle notion qui rappelle aux contribuables que s’ils sont propriétaires d’un bien immobilier, celui-ci demeure avant tout un bien situé sur le territoire national sur lequel l’Etat ne se prive pas de lever des impôts.

La récente initiative de la Région bruxelloise trouve son origine dans le fait que le précompte immobilier est devenu un impôt régional qui constitue l’une de ses principales ressources financières. La Région bruxelloise a en effet largement utilisé ses compétences en matière de fiscalité immobilière l’année dernière pour créer son propre tax shift.

La presse a rappelé à la fin de l’année dernière que cette réforme fiscale n’avait pas eu l’effet escompté. La région cherche donc probablement par ces démarches à rectifier ses erreurs et à renflouer ses caisses au grand dam des propriétaires d’anciennes habitations.

Il existe de nombreux immeubles anciens à Bruxelles dont le revenu cadastral a été fixé en 1975 à une époque où les équipements qui entrent en compte dans la détermination du revenu cadastral étaient rares.

Celles et ceux qui ont pu bénéficier pendant de nombreuses années d’un revenu cadastral modique apprécieront moyennement ces démarches. Pour les propriétaires d’habitations récentes, Il ne s’agira que du rétablissement d’une relative justice fiscale.

Jérôme HAVET

j.havet@avocat.be

Laisser un commentaire

par Anders Noren.

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :