
La fiscalité du travail en Belgique est l’une des plus lourdes au monde, mais elle comporte de nombreuses exceptions et de nombreux régimes de faveur. Le régime de taxation forfaitaire des droits d’auteur est l’un de ceux-ci. Il est même particulièrement à la mode depuis quelques années puisque le montant des droits d’auteur déclarés ne cesse de progresser chaque année dans les statistiques publiées par l’administration. Ce régime de niche qui procure un avantage fiscal exceptionnel a un champ d’application relativement étendu et il est possible que vous puissiez également vous en prévaloir. Nous analyserons avec vous dans les lignes qui suivent les conditions à réunir pour en bénéficier.
- Contexte général
Le régime de taxation forfaitaire des droits d’auteur repose sur les articles 17 et 37 du code des impôts sur les revenus. L’article 17 du code prévoit que ces revenus sont considérés comme tels lorsqu’ils : « résultent de la cession ou de la concession de droits d’auteur et de droits voisins, ainsi que les licences légales et obligatoires, visés au livre XI du code de droit économique ou par des dispositions analogues de droit étranger ».
L’article 17 prévoit ensuite que les revenus tirés de l’exploitation d’œuvres protégées par les droits d’auteur sont taxables comme des revenus mobiliers.
Les œuvres sont protégées par la législation des droits d’auteur lorsqu’elles réunissent trois conditions : il doit s’agir (1) d’une œuvre littéraire ou artistique, (2) originale et (3) qui a été mise en forme.
La condition liée au caractère littéraire ou artistique de l’œuvre ne nécessite pas de s’exprimer comme Marcel Proust ou de dessiner comme Picasso. La définition d’une œuvre littéraire ou artistique est en réalité très large puisqu’elle vise de très nombreuses formes d’expression. Il peut s’agir d’œuvres qui ressortissent au domaine littéraire, scientifique ou artistique. Les œuvres qui sont protégées par la législation des droits d’auteur sont très nombreuses, il peut s’agir de romans, d’articles de presse, de publications scientifiques, de consultations d’un avocat, de plans réalisés par un architecte, de slydes destinés à un cours ou à une conférence, d’un programme informatique ou de bien d’autres formes d’expression.
L’œuvre doit originale, ce qui implique qu’elle doit être l’expression des choix libres et créatifs de son auteur et qu’elle doit être imprégné de sa personnalité. L’œuvre doit aussi être mise en forme : les idées en tant que telles ne sont pas protégeables, elles appartiennent à tous, c’est l’expression de celles-ci sur un support qui confère la protection.
- Qui peut en bénéficier ?
Il n’y a pas de réelle limite aux professions qui peuvent bénéficier du régime des droits d’auteur. Un médecin peut parfaitement les justifier s’il parvient à démontrer qu’une partie de sa rémunération provient de créations littéraires ou artistiques tout comme un architecte, un journaliste, un informaticien ou bien d’autres professions. Un praticien peut être appelé à intervenir comme orateur, rédiger des articles scientifiques, intervenir dans la presse ou encore être amené à rédiger des rapports dans le cadre d’expertises.
Ces prestations sont susceptibles d’être qualifiées, à tout le moins partiellement, d’œuvres génératrice de droits d’auteur et taxées comme des revenus mobiliers. Le travail consistera ensuite à définir la quote-part des droits d’auteur et leur impact sur la rémunération de la personne qui entend en bénéficier, ce qui n’est pas toujours aisé.
Il existe plusieurs méthodes qui permettent d’évaluer de manière forfaitaire le pourcentage des droits d’auteur taxables distinctement. L’une d’entre elle consiste à attribuer un pourcentage du chiffre d’affaires de la société au dirigeant. Il est également possible d’établir qu’une partie de la rémunération du dirigeant est une rétribution de droits d’auteur. La définition de la méthode et du pourcentage est un véritable travail d’équilibriste qui nécessite une analyse au cas par cas avant de s’y lancer.
Il est également possible de consulter l’administration fiscale avant de mettre en place l’opération pour obtenir une décision contraignante qui lie le fisc et empêche toute forme de contentieux en cas de contrôle fiscal.
- Imposition
L’impôt est le précompte mobilier fixé au taux de 15%, il est calculé sur le revenu net, à savoir le revenu brut résultant de la cession des droits d’auteur diminué des frais professionnels exposés. A défaut de pouvoir déterminer quels sont les frais qui se rapportent à ces revenus, ils sont évalués forfaitairement. Il est cependant inutile de chercher à démontrer l’existence de frais professionnels puisque le forfait est extrêmement avantageux.
Concrètement, en 2018, les frais professionnels forfaitaires s’élèvent à 50% jusqu’à 15.990 EUR de droits rétribués, ils sont ramenés ensuite à 25% pour la tranche de 15.990 EUR à 31.990 EUR et tombent à 15% pour la tranche allant de 31.990 EUR à 59.970 EUR après lequel les revenus sont taxés à l’impôt des personnes physiques comme des revenus professionnels.
En d’autres termes, imaginons que votre rémunération annuelle de dirigeant d’entreprise soit de 80.000 EUR bruts et que vous ayez cédé vos droits d’auteur en contrepartie d’une rétribution de 10% de ce montant, soit 8.000 EUR par an. Cette rétribution est taxée selon la formule suivante : 8.000 EUR x 50% (frais forfaitaires) x 15% = 600 EUR d’impôts ce qui est confortable en comparaison du taux de l’impôt des personnes physiques qui atteint facilement 55% dès 40.000 EUR de revenus annuels.
- Conclusion
Le régime de taxation forfaitaire des droits d’auteur, bien qu’il ait gagné en popularité ces dernières années, est encore relativement méconnu. Il est entendu, sauf circonstances exceptionnelles, qu’un médecin ne pourra pas bénéficier des mêmes pourcentages de revenus soumis à ce régime qu’un journaliste ou qu’un écrivain et que le montant des rétributions annuelles ne sera jamais très élevé, mais l’utilisation de ce régime ne doit pas être exclue pour autant, tant il est avantageux pour son utilisateur.
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