
La propriété d’un bien immobilier est soumise à une taxation relativement avantageuse en Belgique. Cette fiscalité est nettement moins favorable lorsque l’immeuble est situé à l’étranger. La Cour de Justice de l’Union européenne a décidé il y a déjà quelques années que le traitement qui visait à prévoir une fiscalité différenciée au sein de l’Union européenne était discriminatoire. Depuis, la Belgique se conforme depuis lors lentement à cette décision. Une première circulaire en 2016 avait mis fin à cette problématique pour le cas de la France et puis des Pays-Bas dont les taux viennent d’être réactualisés. Quelques mots d’explication à propos de cette fiscalité pas toujours bien comprise.
Le précompte immobilier
Le précompte immobilier est l’impôt le plus connu sur la propriété immobilière. Il est calculé sur la base du revenu cadastral indexé et doit être payé chaque année par les propriétaires de biens immobiliers situés en Belgique.
Le calcul de cet impôt désormais régionalisé est relativement complexe puisqu’il est réparti entre plusieurs entités de l’Etat et fait intervenir des notions de centimes additionnels parfois difficiles à saisir.
Les régions se réservent un pourcentage du revenu cadastral indexé et les communes, provinces et agglomérations empochent ensuite des centimes additionnels (soit un nombre de centièmes d’euros) qui constituent l’essentiel de l’impôt.
Illustrons ce calcul complexe par l’exemple d’un immeuble dont le revenu cadastral a été fixé à 1.000 EUR avant indexation :
En 2018, le coefficient de revalorisation du revenu cadastral est de 1,7863, le taux du précompte immobilier est de 1.25% pour la région de Bruxelles Capitale, l’agglomération peut prélever 989 (9,89%) centimes additionnels et la commune d’Ixelles, par exemple, 2.760 (27,6%) centimes additionnels.
Revenu cadastral indexé | 1.000 EUR x 1.7863 | 1.786 EUR |
Impôt régional | 1.786 x 1.25 % | 22,32 EUR |
Impôt communal | 1.786 x 27,60 % | 492,93 EUR |
Impôt agglomération | 1.786 x 9.89 % | 176,63 EUR |
Total : | 691,88 EUR |
Il existe de nombreuses possibilités de réduire le montant du précompte immobilier, la plus connue étant la réduction accordée aux parents d’enfants en âge de recevoir les allocations familiales, mais il existe aussi des réductions pour les propriétaires de logements modestes (dont le montant du revenu cadastral n’excède pas 745 EUR), pour les biens qui sont classés ou encore, à Bruxelles, pour les personnes qui sont effectivement domiciliées dans le bien dont ils sont les propriétaires.
La taxation des revenus générés par l’immeuble à l’impôt des personnes physiques
La propriété peut également générer une taxation à l’impôt des personnes physiques au même taux progressif que celui qui s’applique aux revenus et en supplément de ceux-ci. Cette taxation varie selon le type de bien, son affectation et le lieu où il est situé.
La propriété de biens immobiliers bâtis situés en Belgique qui ne sont pas donnés en location bénéficie d’une taxation particulièrement favorable puisque les propriétaires sont imposés uniquement sur la base du revenu cadastral indexé majoré de 40% selon l’article 11 du Code des impôts sur les revenus.
Cette taxation est souvent neutralisée par l’article 12, §3 du Code des impôts sur les revenus qui prévoit que l’habitation qu’occupe un propriétaire est exonérée d’impôt. Il n’y a donc pas d’impôt sur les revenus lorsque vous êtes le propriétaire d’une seule habitation que vous occupez. Si vous possédez plusieurs habitations (une résidence principale et une résidence secondaire, par exemple), vous avez le choix de soumettre à l’exonération le bien de votre choix. Bien entendu, le précompte immobilier doit quand même être payé.
La taxation d’un bien immobilier bâti donné en location varie selon que le bien est occupé par un particulier ou par quelqu’un qui l’affecte à l’exercice d’une activité professionnelle.
Le bien donné en location à une personne physique qui ne l’affecte ni totalement, ni partiellement à l’exercice d’une activité professionnelle subit le même sort fiscal que les immeubles qui ne sont pas donnés en location, ils sont imposés sur la base du seul revenu cadastral indexé de l’immeuble majoré de 40%.
Les biens affectés à une activité professionnelle subissent quant à eux, une taxation différente puisqu’ils sont taxés sur la base des loyers bruts réduits de 40% de frais forfaitaires.
La taxation est donc nettement moins avantageuse pour les commerces que pour les habitations privées puisque le revenu cadastral est presque toujours inférieur au revenu locatif d’un immeuble qui est loué à des fins professionnelles.
La taxation des biens immobiliers à l’étranger
La taxation d’un bien immobilier situé à l’étranger est réglée par l’article 7 du Code des impôts sur les revenus qui prévoit que c’est la valeur locative brute de l’immeuble diminuée de 40% qui doit être déclarée. Il s’agit d’une formule inédite puisqu’elle se base sur une valeur de marché et non sur une valeur fictive comme c’est le cas pour les biens immobiliers loués à des particuliers en Belgique ou sur un rendement locatif pour les biens loués en Belgique à des professionnels.
Une brève réflexion amènera le lecteur attentif à constater rapidement qu’il s’agit d’une différenciation de traitement. Une telle différence n’est pas permise en droit européen lorsqu’elle est discriminatoire. C’est le constat qu’en a fait la Cour de Justice de l’Union, saisie d’une question préjudicielle posée par la Cour d’appel d’Anvers sur la légalité de cette règle, qui a jugé qu’un tel régime était discriminatoire dans un arrêt du 11 septembre 2014.
Bien entendu, cette discrimination ne peut être interdite par cette juridiction que pour le territoire de l’Union européenne. Les propriétaires d’immeubles situés en dehors de ce territoire devront se résigner à continuer à appliquer la formule décrite ci-avant.
Dans un premier temps, l’administration s’est montrée très réticente à appliquer cette décision de justice et a continué à appliquer la disposition illégale du Code des impôts sur les revenus. Les contribuables qui n’avaient d’autre choix que d’introduire de nouvelles procédures judiciaires.
Il est vrai qu’il est difficile pour les propriétaires belges de biens à l’étranger de connaître avec précision le montant devant être déclaré puisque la taxation belge repose sur la notion de revenu cadastral qui est un concept qui n’existe qu’en Belgique.
Depuis quelques années l’administration s’est néanmoins résignée à publier quelques circulaires pour guider ces propriétaires. Elle s’est intéressée d’abord à la France dans une circulaire du 29 juin 2016 dans laquelle l’administration propose de s’en référer à la « valeur locative brute » reprise sur l’avis d’imposition français. La France applique un système similaire à la Belgique et l’administration française détermine elle aussi la valeur des biens immobiliers. La circulaire prévoit une formule pour obtenir le montant à déclarer en Belgique.
L’administration fiscale belge a également réglé le sort des biens immobiliers situés aux Pays-Bas pour lesquels elle applique désormais une formule assise sur la valeur de vente fixée par l’administration fiscale néerlandaise « WOZ » (waardering onroerende zaken) dont les taux viennent d’être revus en 2018.
Les propriétaires de biens situés dans d’autres pays ne sont toujours pas fixés sur leur sort. Une chose est cependant certaine, il faut refuser l’application de la déclaration de la valeur locative brute du bien immobilier lorsque celui-ci se trouve sur le territoire de l’UE.
Impact limité sur l’impôt sur les revenus
La fiscalité internationale est largement réglée par les conventions préventives de la double imposition que la Belgique a conclues avec de nombreux pays dans le monde. Ces conventions prévoient de manière quasi-systématique que les revenus des biens immobiliers sont taxés dans le pays dans lequel est situé le bien, « sous réserve de progressivité en Belgique ».
En pratique, les revenus des biens immobiliers ne sont pas taxés en Belgique, mais ils sont ajoutés à vos revenus pour déterminer le taux qui leur est applicable. Les biens immobiliers situés à l’étranger ne sont donc pas taxés en Belgique, mais le taux auquel vos revenus de source belge seront taxés sera plus élevé si vous avez des biens à l’étranger que si vous n’en possédez pas.
La Belgique taxera en revanche en Belgique les biens immobiliers situés dans des pays avec lesquels elle n’a pas signé de convention, même si les revenus de ces biens ont déjà été taxés dans le pays en cause, mais elle réduira la base imposable de 50%. Ces situations sont toutefois extrêmement rares puisque la Belgique a signé près de 100 conventions.
Conclusion
La fiscalité des locations immobilières est assez complexe puisqu’elle prévoit une formule de taxation différenciée pour chaque type de location. Nous ne sommes pas entrés dans les détails des locations du type « AirBnB » qui posent de nouvelles questions depuis quelques années.
Il est entendu que les propriétaires de biens immobiliers vérifieront la destination des biens qu’ils mettent en location avant de signer le contrat de bail. Les propriétaires de biens à l’étranger seront quant à eux attentifs au fait que certaines règles ont changé et qu’il est possible de réaliser quelques économies d’impôts.
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