L’usufruit, la superficie et l’emphytéose : moyens de planification alternative avantageux ?

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1. Trois droits pour la réalisation d’un objectif : financer une acquisition immobilière.

Les constructions juridiques liées à des droits réels démembrés convergent généralement à la réalisation d’un objectif unique : l’attribution d’un bâtiment qui a été financé par une société à une personne physique sans indemnité ou moyennant une indemnité réduite.

Ces constructions sont très souvent combattues par le fisc qui les considère comme artificielles. Elles sont pour l’essentiel, à l’origine de l’adoption de l’article 344 du CIR qui permet à l’administration de remettre en cause les constructions qui respectent la loi fiscale, mais « en trahissent l’esprit ».

Bien équilibrées, ces constructions sont cependant toujours exploitables. Une évaluation précise des avantages recueillis par chacune des parties permet d’aboutir à l’absence de taxation dans le chef de la personne physique qui se voit attribuer au terme, le bâtiment en pleine propriété lors de l’extinction du droit.

2. Quel droits pour quelle opération?

Le droit de superficie a pour effet de créer un droit de bâtir sur un immeuble appartenant à un tiers (le tréfoncier), pour une durée déterminée n’excédant pas 50 ans.

Ce droit divise donc la propriété du terrain ou du bien initial et les nouvelles constructions entre deux personnes distinctes.

Ce droit est régi par la loi du 10 janvier 1824. Celle-ci prévoit qu’à l’expiration du droit de superficie, les constructions érigées devront être remboursée par le tréfoncier qui les récupère.

Cette loi permet toutefois de dispenser le tréfoncier de procéder à cette indemnisation (art. 6 et 8).

En d’autres termes, du point de vue strict du droit civil, il est tout à fait possible de prévoir qu’à l’expiration de la superficie, le tréfoncier ne sera pas tenu d’indemniser la société pour les travaux réalisés.

L’emphytéose est un droit qui porte sur un fonds pour une durée de 27 à 99 ans. Sa durée minimale est nettement plus longue que celle de la superficie et les droits qu’elle fait naître dans le chef du preneur (l’emphytéote) sont plus étendus : Il peut tant exploiter le fonds que les bâtiments qui y sont érigés. Il peut également ériger des constructions sans obtenir la permission préalable du tréfoncier.

Contrairement à la superficie, le principe de base érigé par la loi prévoit que le tréfoncier ne doit pas indemniser l’emphytéote à la fin du droit.

L’usufruit est un droit d’usage, il permet à l’usufruitier (ici, la société) d’utiliser un bien pendant une durée déterminée. L’usufruitier n’a en principe pas le droit d’ériger des constructions, ni même d’effectuer de lourdes transformations ou réparations. S’il en réalise, elles devront faire l’objet d’une indemnisation par le nu-propriétaire lors de la fin du droit.

Chacun de ces droits répond donc au souci d’opération biens particulières qu’il faudra analyser avec précaution pour déterminer quel est l’option la plus adaptée.

3. traitement fiscal

La superficie et l’emphytéose permettent l’érection de bâtiments sur le fonds d’autrui et un retour du bâtiment dans le chef du propriétaire de ce fonds sans indemnisation ou avec une indemnisation réduite.

L’administration fiscale n’aime pas ces constructions et tente souvent d’imposer la société qui a construit les bâtiments ainsi que le propriétaire du fonds qui les récupère sans indemnisation (souvent le gérant ou un administrateur), au titre d’un avantage anormal ou bénévole, d’un avantage de toute nature, ou autre.

La jurisprudence n’est pas toujours de cet avis : L’absence d’indemnisation n’est pas forcément un avantage de toute nature dans le chef du gérant. La Cour d’appel d’Anvers et la Cour d’appel de Bruxelles déjà balayé la thèse de l’administration à plusieurs reprises.

Dans l’arrêt de la Cour d’appel d’Anvers, un administrateur avait concédé à sa société un droit de superficie pour une durée de 15 ans. La société devait payer une redevance annuelle de 1 BEF pour l’occupation du droit et y construire un bâtiment. La Cour d’appel d’Anvers a comparé et compensé les avantages recueillis par les parties (l’occupation gratuite d’un terrain pendant 15 ans pour l’une et la récupération d’un immeuble bâti  sur le terrain après 15 ans) pour en déduire l’absence d’un ATN.

L’usufruit suit le même raisonnement, le Service des décisions anticipées s’est prononcé sur la question de la constitution d’un droit d’usufruit pour une durée de 25 ans dans lequel le nu propriétaire doit récupérer la propriété d’un bien entièrement rénové par sa société. Ledit bien était destiné à l’activité économique de la société et le Service en a déduit l’absence d’un avantage de toute nature (ruling n° 900.432 dd. 27.04.2010).

Un arrêt de la Cour de cassation du 20 juin 2013 rejoint d’ailleurs cet avis.

Dans ces affaires, les structures mises en place sont destinées à l’acquisition de bâtiments par une société à des fins opérationnelles, il est plus difficile aujourd’hui de pouvoir justifier l’absence d’un avantage de toute nature lorsque l’immeuble est acquis par la société, mais occupé exclusivement (ou quasi-exclusivement) par le gérant ou l’administrateur pour son habitation personnelle, rien n’est impossible toutefois.

La durée du droit est également importante. Elle doit correspondre à une réalité économique et ne pas être trop courte. Aux démembrements que l’on limitait jadis à 10 ou 15 ans, on préférera aujourd’hui une durée plus longue de 20 ou 25 ans.

4. La recherche de la voie la moins imposée

La mise en place d’une construction juridique pour bénéficier d’un avantage fiscal est autorisée de longue date dans la jurisprudence de nos cours et tribunaux (arrêts Brepols, Au vieux Saint-Martin, par exemple).

Ces « constructions » impliquent que l’ensemble des règles fiscales et civiles soit respecté dans le processus de mise en place pour être parfaitement valables. Toutes les règles juridiques doivent donc avoir été scrupuleusement respectées.

Sachant que les mécanismes mis en place sont souvent réalisés, avec l’intervention de notaires, géomètres et architectes, ils demandent l’obtention de permis d’urbanisme et le respect de nombreuses autres règles juridiques. Il est indispensable de s’attacher les conseils d’une personne maitrisant parfaitement toutes les facettes de la constitution de tels droits.

Le cabinet vous guide dans l’élaboration de ces structures juridiques complexes.

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par Anders Noren.

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