
Les dividendes d’actions françaises moins taxés que les belges? La perception de revenus mobiliers d’origine étrangère présente le désagrément de générer une double taxation qui rend l’investissement dans ce type d’actions étrangères beaucoup moins attrayant que celui qui aurait été réalisé dans des actions belges. Un arrêt de la Cour de cassation vient de rétablir l’intérêt de l’investissement à l’étranger en actions et plus particulièrement françaises. Quelques mots d’explication s’imposent.
La Belgique taxe les dividendes d’actions à un taux de 30%. Sauf cas particuliers, une action qui produit un revenu de 100 EUR sera donc amputée de 30 EUR et procurera 70 EUR de revenus à son propriétaire.
Les dividendes d’actions étrangères détenues par des personnes physiques résidentes en Belgique subissent une double taxation. En France par exemple, le taux de l’impôt sur les dividendes distribués à des non-résidents est fixé à 30%. Le revenu de notre exemple sera donc taxé une première fois en France et une seconde fois en Belgique au même taux, 100 EUR de revenus seraient donc réduits à 49 EUR une fois le double impôt de 30% prélevé (30 EUR en France et 30% de 70 EUR, soit 21 EUR en Belgique).
Bien consciente de cette problématique, l’Union européenne largement incompétente en matière fiscale, laisse donc à ses états membres le soin de négocier entre eux pour réduire ces cas de double imposition qui freinent les investisseurs à acquérir des actions à l’étranger. L’investissement à l’étranger dans les valeurs mobilières est donc largement défavorable.
La Belgique a conclu un très grand nombre d’accords avec d’autres Etats qui portent le nom de « conventions préventives de la double imposition ». Ces conventions prévoient généralement que l’Etat de la source doit limiter l’imposition du revenu mobilier à 15% lorsqu’il est recueilli par des personnes physiques.
Ces accords présentent cependant toujours au moins deux désagréments majeurs. D’abord, s’ils procurent certes un avantage fiscal par rapport à la situation qui prévaudrait en leur absence, ils ne permettent pas d’assurer une véritable neutralité fiscale puisque le double taux appliqué au revenu réduit toujours son montant de 40,5% (100 x 0,15% = 85 – 30% = 59,50). Ensuite, ils n’impliquent pas nécessairement que l’impôt à la source sera réduit à 15% et obligent bien souvent les contribuables à introduire auprès du fisc étranger, une demande de remboursement de la différence entre le taux appliqué et le taux plafonné à 15% par la convention.
La Belgique et la France ont mis en place un régime particulier qui a pour objectif de supprimer totalement cette double imposition. Ce régime appelé « quotité forfaitaire d’impôt étranger » ou QFIE prévoit que la France peut imposer les contribuables belges à hauteur de 15% maximum et la Belgique à un taux de 30% ensuite, mais que la Belgique doit ensuite octroyer un crédit d’impôt équivalent aux 15% prélevés en France.
La Belgique n’a jamais octroyé ce crédit d’impôt aux particuliers parce que l’administration fiscale considérait que les actions devaient être détenues à titre professionnel pour bénéficier de cet avantage, ce que la Cour de cassation a finalement écarté dans un arrêt du 16 juin 2017. La Cour de cassation a ensuite renvoyé l’affaire à la Cour d’appel d’Anvers qui doit encore trancher le litige dont le résultat semble aujourd’hui évoluer dans un sens favorable au contribuable.
La QFIE procure un que son application aux 100 EUR de évoqués dans notre exemple met clairement en lumière : taxés à 15% en France, ces 100 EUR se réduisent à 85 EUR qui, taxés à nouveau à 30% en Belgique, se réduisent à 59,50 EUR. Comme la Belgique doit doit octroyer un crédit d’impôt de maximum 15% des 85 EUR du revenu net « frontière », soit 12,75 EUR. La taxation du revenu de notre action française est donc de 100 EUR – 15 EUR (impôt français) – 25,50 EUR (impôt belge) + 12,75 (QFIE) = 72,25 EUR. Le taux de l’impôt de ce revenu serait donc de 27,75 % alors qu’il aurait été de 30% si le même revenu avait été distribué par une action belge.
Dans l’attente de l’arrêt de la Cour d’appel d’Anvers, les contribuables qui se trouvent dans cette situation peuvent demander le remboursement de l’impôt perçu indûment par la Belgique en adressant une demande à l’administration fiscale. Cette demande pourrait même concerner les 5 dernières années puisqu’un arrêt de la Cour de cassation constitue en principe un « fait nouveau » qui permet d’ouvrir une procédure qui autorise de revenir 5 ans en arrière.
Cet arrêt qui est attendu de pied ferme par les praticiens sera donc l’occasion de vérifier s’il est devenu plus avantageux d’investir dans des actions françaises que dans des actions belges. Dans l’attente de cette décision, nous recommandons aux contribuables victimes de dans cette situation de double imposition de faire valoir leurs droits devant l’administration et ce, à tout le moins à titre conservatoire.
Laisser un commentaire